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Chapitre 14: Le mystère Malefoy

 

« - Aujourd'hui, nous allons préparer une potion d'Amnésie !, lança un professeur Coon avec entrain alors que nous étions à peine entrés dans la classe. Bien que nous ne soyons qu'en novembre et que la potion requiert concentration et habilité, je pense que vous avez le niveau et c'est ce que nous allons voir. La recette se trouve page 172. Au travail ! »

 

J'ouvris mon livre avec hâte. J'adorais faire des potions ! J'allai chercher sur l'étagère les ingrédients nécessaires sous l'œil curieux de Coon. Il paraissait aussi surexcité qu'à la rentrée. Il ne pouvait s'empêcher, à chaque cours, de m'ensevelir sous des compliments et des cris surexcités quoi que je fasse, ce qui était horriblement gênant. En dehors des Serpentard et leurs habituelles moqueries et insultes, même certains Gryffondor finissaient par être agacés d'être relayés au second plan. Mais mes camarades semblaient quand même contents étant donné que je rapportais des points en quantité astronomique à chaque cours. Mais j'aurais préférée être traitée comme une élève normale plutôt que comme un prodige -que je n'étais même pas. Je reconnaissais m'en sortir en potion, mais il s'adressait à moi comme si j'étais un génie. J'osais espérer que cette fois-ci il ne hurlerait pas « FANTASTIQUE MISS HAYLEEN ! 10 POINTS POUR GRYFFONDOR ! » à tout bout de champ.

 

« - Vous voyez ?, s'exclama le professeur Coon d'un air ravi. Miss Hayleen à bien disposé ses ingrédients dans l'ordre, prêts à être utilisés, afin de bien discerner les composants. C'est la bonne chose à faire ! 5 points pour Gryffondor ! »

 

Raté. Note : ne plus jamais disposer ses ingrédients dans l'ordre et même en faire tomber un. Coon avait apparemment décidé de changer considérablement sa vie puisque au lieu de faire gagner 10 points en 10 minutes, il m'en avait fait gagner 5 en 5 minutes et 30 secondes.

Les Serpentard sifflèrent d'un air méprisant. Les Gryffondor sourirent d'un air ravi. Je tentai de me tasser dans ma chaise, rouge de honte. Oui, ça faisait gagner beaucoup de points et c'était super pour la Maison, mais ce n'était pas juste. J'étais clairement favorisée et je détestais ça. Mais bon.

 

« - Ça va, ça va !, ronchonnai-je à l'adresse d'Ethan et d'Hugo qui riaient, une fois Coon parti.

- Tu vas faire gagner des centaines de points à la Maison ! Aucune chance de perdre la Coupe, dit Hugo en disposant ses ingrédients sur sa table.

- A tous les coups, Automne va penser que ce n'est pas juste ? », dit Ethan en esquissant un demi-sourire.

 

Merlin, comment faisait-il pour me deviner aussi bien à chaque fois ?! Il rit devant mon expression hébétée.

 

« - Ce n'est pas toi qui est injuste, c'est lui, rectifia Hugo.

- Mais c'est bien à moi que les Serpentard en veulent, et pas à lui, répondis-je en esquissant un regard inquiet vers ceux-ci.

- Bah, ils en veulent à tout le monde de toute façon », dit Ethan en haussant les épaules.

 

Je répondis par un sourire tandis que je remuais la potion après avoir ajouté les brins de valériane. Puis j'inspirai une bouffée de courage et me lançai dans ce que je comptais dire depuis deux jours :

 

« - J'ai pris une décision, dis-je le plus nonchalamment possible.

- Qui est ?, demanda Hugo qui venait juste de renverser un peu de son paquet d'ingrédient standard sur le sol.

- Je vais retourner dans la Forêt Interdite », dis-je tout de go.

 

Cette fois-ci, c'est le paquet entier d’Hugo qui se vida sur le parquet. Quand a Ethan, il lâcha les baies de gui qu'il devait mettre dans le mortier au-dessus du chaudron et en un espèce de « splof » sonore, la potion était fichue.

 

« - Pardon ?!, rugit Ethan en fusillant du regard le chaudron. Tu veux te faire expulser pour de bon ?

- Enfin, Automne !, s'écria même Hugo. Tu as eu la chance de ne pas te faire renvoyer samedi ! Une unique chance !

- C'est le seul moyen de savoir ce qui se passera, expliquai-je sur un ton dur. Je veux demander à Meryan ce que disent les étoiles ! »

 

Ils étaient tellement pétrifiés de stupeur que malgré tout ce qu'ils avaient l'air d'avoir envie de dire, ils ne disaient rien.

 

« - Je vais mourir à une date indéterminée, rappelai-je la gorge serrée. Si j'arrivais à parler à Meryan, il pourrait me révéler combien de temps il me reste pour tout changer, et de quelle manière !

- Mais on ne veut pas que tu sois renvoyée de Poudlard, dit enfin Ethan les yeux débordant d'inquiétude.

- Vous préférez que je meure ? », répliquai-je brutalement.

 

J'y étais allée un peu fort, mais cette fois je ne me sentais pas coupable.

 

« - On ira avec toi, dit Ethan d'un air déterminé, le ton sans répliques.

- Mais, si nous nous faisons avoir, vous serez renvoyé ! Je ne veux pas que vous soyez banni d'études par ma faute !, m'écriai-je néanmoins touchée.

- On ira avec toi ! », répéta Hugo en se levant -et en marchant sur l'ingrédient standard.

 

Une bouffée d'amitié me remplit soudainement le cœur. Je leur adressai un sourire reconnaissant et le cours se termina en un silence complice, même pas interrompu par les exclamations de Coon à mon égard, les insultes des Serpentard ou les ronchonnements diverses des élèves ayant raté leur potion -accompagnés des soupirs du professeur Coon.

Alors que nous allions en cours de Métamorphose, Cassandra me dépassa tout en prenant bien soin de me cogner et de faire tomber mon sac. Elle se retourna et me fit un sourire méprisant tandis que je ramassai mes affaires.

 

« - C'est qui, cette fille ?, demanda Hugo. Des problèmes avec elle ?

- Cassandra, elle partage mon dortoir. Elle est infecte, mais je ne sais même pas pourquoi. Ça n'a pas d'importance, raillai-je en voyant qu'ils s'apprêtaient à protester. Allons en métamorphose, McGonagall ne vas pas apprécier si on est en retard. »

 

En entrant dans la salle avec les Serdaigle, Augustina m'adressa un petit sourire accompagné d'un signe de la main. Je m'assieds à côté d'elle, derrière Ethan et Hugo.

 

« - Ça ne va pas, Automne ?, demanda-t-elle l'air absent.

- Oh, si, dis-je en esquissant un sourire. Je suis simplement fatiguée, aujourd'hui.

- C'est sûrement à cause des Joncheruines, dit Augustina rêveusement. Ils entrent par les oreilles et embrouillent le cerveau, donc ils peuvent perturber ton humeur.

- Peut-être, effectivement. »

 

Les Joncheruines n'existaient pas, mais je n'eus pas envie de la contrarier. J'aimais beaucoup Augustina. J'aurais tellement préféré l'avoir comme camarade de dortoir à la place de Cassandra !

 

« - Ce doit être inconfortable, de dormir dans un arbre, non ?, dit-elle soudainement.

- Je n'y ai pas vraiment réfléchi, à vrai dire, répondis-je maladroitement.

- Fais attention, il y a de drôle de créatures dans les arbres, conseilla-t-elle.

- Oh, merci, mais Hagrid me l'a déjà dit. Il y a des Botrucs.

- Ceux-là ne sont pas très importants, répliqua-t-elle en secouant la tête. Il faut se méfier des Héliopathes, c'est plutôt rare qu'ils y soient mais c'est toujours possible. Il y a aussi des Nargoles, des Enormus à Babille... »

 

Augustina continua de me parler de diverses créatures imaginaires tandis que je tentai de me concentrer sur le cours du professeur McGonagall, qui ne sembla pas remarquer les bavardages de mon amie Serdaigle.

 

« - Professeur ?, demanda soudainement Phil, interrompant l'explication du professeur McGonagall.

- Oui, Mr Finnigan ?

- J'ai entendu parler de quelque chose... Anarus... Animorus...

- Animagus ?, corrigea le professeur McGonagall en fronçant les sourcils.

- Oui, s'exclama Phil. Je me demandais, professeur, si vous pouviez nous expliquer ce que c'est ? »

 

Un bourdonnement sonore se mit à enfler dans la pièce, accompagné de sourcils froncés et de regards d'incompréhension. Qu'était un Animagus ? Et pourquoi Phil avait interrompu McGonagall pour demander quelque chose qui n'avait rien à voir avec le cours ?

 

« - C'est quelque chose que vous ne verrez qu'en 3ème année, répondit-elle sèchement. Je vous prierai d'attendre deux ans et d'écouter le cours !

- S'il vous plaît », supplia-t-il.

 

La classe était maintenant plongée dans un silence appuyé. Tout le monde fixait McGonagall. Elle fronça les sourcils puis soupira.

 

« - Un Animagus est une personne qui peut se transformer en animal quand il le veut, expliqua-t-elle. C'est une technique avancée et très difficile qui requiert beaucoup de patience et de détermination. Il ne suffit pas de se dire « Je veux me transformer en chat » ou de faire un mouvement de baguette ! Cependant, on ne choisit pas l'animal en lequel on se transforme : c'est celui qui correspond le mieux à notre personnalité. Mais on ne devient pas non plus un Animagus sans autorisation du Ministère de la Magie, appuya-t-elle en jetant un regard sévère par-dessus ses lunettes. Il faut avoir une bonne raison de vouloir être un Animagus. En général, ce sont les aurors qui demandent à le devenir, pour leurs missions et on les y autorise généralement.  Les Animagus non-déclarés sont jugés de façon draconienne et punis. La transformation peut être très douloureuse, surtout au début, c'est pourquoi il faut avoir la volonté requise. »

 

Je l'écoutai bouche bée -tout comme les autres élèves, même Augustina. C'était fascinant. Ce que ce devait être bien de pouvoir se transformer en animal... Pour moi, ça ne faisait aucun doute : je me transformerais en aigle. Même si j'aurais préféré être un animal plus petit, afin de pouvoir se faufiler partout sans être vu.

 

« - Je me demande pourquoi Phil a demandé ça, dit Ethan une fois sortis de la salle de classe.

- Il a dû trouver ce mot quelque part et s'être demandé ce que c'était, c'est tout, répondit simplement Hugo.

- Vous ne trouvez pas ça génial, vous ?, demandai-je.

- D'être un Animagus ? Selon la directrice, ça à l'air vraiment dur à faire. Et puis, ça ne sert pas à grand-chose.

- Ça ne sert pas à grand-chose ?, répétai-je en m'arrêtant. Mais enfin ! C'est trop génial ! Si tu as besoin de te cacher, de fuir, de suivre quelqu'un discrètement, c'est parfait ! D'autant plus qu'il n'y a pas beaucoup d'Animagi. Personne ne peut se douter que tu te caches derrière une chouette, un furet...

- Excepté peut être un aigle, souligna Hugo avec un sourire amusé.

- C'est vrai, mais ça n'empêche pas de fuir, de cacher ou de suivre quelqu'un à l'extérieur !

- On dirait que ça t'emballe particulièrement !, dit Ethan. Tu aimerais devenir un Animagus ?

- Et bien je dois avouer que c'est vraiment tentant, dis-je. Mais de toute manière, je suis loin d'avoir le niveau requis. Je n'ai que 11 ans ! Et en plus, il faut l'autorisation du Ministère. Imaginez... Pouvoir se transformer en animal ! »

 

Alors que nous riions en imaginant tout ce que l'on ferait, j'aperçus au coin de l'œil quelqu'un se presser contre le mur et monter l'escalier assez vite, regardant avec méfiance à droite et à gauche.

 

« - Malefoy ! », m'exclamai-je à mes amis.

 

Nous n'avons même pas eu à avoir besoin de nous parler pour nous comprendre : nous voilà partis tous les trois dans les escaliers, à la poursuite de Scorpius. Mais alors qu'il tournait à l'angle d'un couloir, le Préfet nous tomba dessus.

 

« - Automne ?

- Oh, bonjour, Matthiew, dis-je précipitamment en me tordant pour tenter d'apercevoir Scorpius dans le couloir sombre où il avait disparu.

- Que faites-vous là ?, demanda le Préfet en fronçant les sourcils. Vous n'êtes pas dans la Grande Salle ?

- Nous allions à la Salle Commune, répondit adroitement Ethan.

- Ce n'est pas par-là », dit Matthiew.

 

C'était bien tenté, mais c'était raté. Je croisai le regard paniqué de mes amis et tentai d'expliquer ce qui me passa par l'esprit.

 

« - On est un peu fatigués, comme tous les lundis », ris-je.

 

Le Préfet sembla sceptique mais nous proposa finalement de nous accompagner étant donné que lui aussi avait besoin d'y aller. J'échangeai un regard déçu avec Ethan et Hugo : le blond nous était passé sous le nez.

Le temps de faire semblant d'aller chercher quelque chose dans notre dortoir respectif et de redescendre et nous étions assis à la table des Gryffondor.

 

« - On était à deux doigts de découvrir ce qu'il mijotait !, marmonna Hugo en piochant dans le bocal de dragées surprises de Berthie Crochue.

- Je me demande vraiment ce qu'il allait faire dans ce couloir bizarre, dit Ethan.

- Je l'ignore, mais une chose est sûre, il ne voulait pas se faire voir !, répondit Hugo pensivement.

- Une bonne raison de plus d'être un Animagus », soufflai-je malicieusement.

 

Soudain, des dizaines de chouettes pénétrèrent la Grande Salle. L'heure du courrier ! Neige m'apporta la Gazette du Sorcier une lettre de Carter qui m'informait de la date précise du premier match de Quidditch. Mais après lui avoir donné un morceau de pain et qu'elle se soit envolée, une chouette aux plumes foncées et à l'air grognon se posa devant moi, un petit morceau de parchemin plié dans son bec. Je fronçai les sourcils et dépliai le papier :

 

« Ce soir. 18 heures. Tour d'Astronomie. Sois à l'heure. Seule. »

 

Je retournai le papier dans tous les sens puis le repliai, troublée. Il n'était même pas signé.

 

« - Qu'est-ce que c'est, Automne ?, demanda curieusement Hugo tout en donnant à manger à son hibou.

- Une demande de rendez-vous à 18 heures ce soir dans la Tour d'Astronomie, répondis-je. Mais il n'y a aucune signature. »

 

Ethan me prit le papier des mains et, après l'avoir lu, le passa scrupuleusement à la loupe, les sourcils froncés.

 

« - Tu n'as aucune idée de qui est le propriétaire de ce hibou ?, demanda-t-il en observant l'animal s'envoler.

- Pas la moindre, soupirai-je.

- Tu n'iras pas, n'est-ce pas ?, dit Hugo l'air inquiet.

- Et bien..., répondis-je hésitante. J'avais l'intention, si. Je ne devrais pas ?

- Ce n'est même pas signé !, s'écria Ethan en me regardant droit dans les yeux. N'y va pas, ce pourrait être une autre attaque ! Rappelons l'hypothèse que le Serpentard qui t'a attaquée ait été renvoyé : et si ce message provenait de ses amis qui voudraient le venger en t'infligeant d'autres blessures ? »

 

Malgré ma curiosité à l'égard de ce rendez-vous, je ne pouvais que reconnaître qu’Ethan avait raison. Ce n'était même pas demandé gentiment. A quoi bon s'y risquer ? De toute façon, si l'auteur voulait vraiment me voir pour une raison saine, il me renverrait un message pour m'expliquer, et...

 

« - Automne ? », appela Hugo timidement.

... Le hibou était revenu.

 

« Ce n'est pas pour te faire du mal, c'est une promesse. S.M. »

 

« - Est-ce que ça va, Automne ?, demanda précipitamment Hugo. Tu es toute blanche !

- C'est Scorpius, réussis-je à souffler.

- Pardon ?! », s'écria Ethan en manquant de renverser son verre.

 

Une fois encore, il m'arracha le morceau de parchemin des mains et manqua de le déchirer, puis le passa à Hugo tandis que je jetai un regard à la table des Serpentard : Scorpius me fixait sans sourire et attendait apparemment une réponse. Je n'hésitai pas longtemps et hochai la tête, après quoi il détourna son regard et commença à parler avec des armoires à glaces. Ethan, à qui la scène n'avait pas échappé, grogna d'un air sévère :

 

« - Non, mais ça ne va pas ?! Ne tombe pas dans ses filets !

- Je ne tombe pas dans ses filets, répliquai-je sur le même ton. J'estime seulement pouvoir lui faire confiance.

- Lui faire confiance ?!, s'énerva Hugo à son tour. Lui faire confiance !

- Il veut peut être me parler de ce qu'il mijote, c'est intéressant !, répondis-je.

- Oui, et te fourrer dans ses problèmes, à l'occasion !, cassa Ethan les yeux lançant des éclairs. Tu n'as aucune dette envers lui, Automne ! Ne lui donne pas l'occasion de te faire renvoyer !

- A 18 heures, on a le droit de vadrouiller dans le château, dis-je agacée. Je sais me défendre ! S'il veut m'attirer des ennuis, je m'en irai et j'irai en informer le professeur McGonagall, voilà tout !

- Tu plaisantes ! Si ça se trouve, il sera avec d'autres Serpentard et qui sait ce qui peut arriver !, dit Hugo les sourcils froncés.

- Écoutez, les garçons, c'est gentil de vouloir me protéger, mais je pense vraiment qu'il n'y a rien à craindre ! Je vous ai déjà dit qu'il n'est pas aussi mauvais que vous le croyez !

- On parle d'un Malefoy, Automne !, s'échauffa Hugo. Une famille de Mangemorts ! Son père lui-même en était un !

- Mais il n'est pas son père !, finis-je par crier, excédée. Vous êtes énervants, à la fin, de me dire ce que je dois faire ou pas ! Laissez-moi vivre le temps qu'il me reste ! »

 

Sur ce, j'attrapai mon sac et sortit de la Grande Salle d'un pas brutalement lourd. Une fois assise à une table de la bibliothèque, mon manuel Mille herbes et champignons magiques ouvert, je ruminai : j'irai à ce rendez-vous. Je doutais sérieusement que Scorpius aurait pu me faire du mal, d'autant plus qu'il me l'avait promis. Je me demandais juste ce qu'il me voulait. Avait-il besoin que je lui procure quelque chose ? De l'Aigle ? Il ne restait qu'à attendre pour répondre à cette question.

L'après-midi passa avec une lenteur incroyable, pour la première fois depuis que j'avais appris que mon temps était compté, non seulement parce que je n'avais pas reparlé à Ethan et Hugo et que c'était bien plus ennuyeux sans eux mais aussi parce qu'évidemment, le temps décide toujours de passer lentement quand on veut qu'il défile et vice-versa. Même le cours de botanique me parut durer des heures au lieu d'une.

Mais enfin, 17h50 arriva. Je fermai les livres que j'étais en train d'étudier près de la cheminée de la Salle Commune, laissai mon sac dans mon dortoir et en jetant un coup d'œil à mes deux amis qui ne daignèrent pas lever le regard vers moi, sortis de la pièce.

Il faisait frais dans les couloirs de Poudlard. Je grimpai les escaliers, ma curiosité grandissant à chaque marche, partagée aussi avec un peu de méfiance.

 

J'arrivai enfin à la Tour d'Astronomie et constatai que Scorpius n'était pas encore arrivé, ce qui m'arrangea : j'ai toujours détesté arriver en dernière, j'ai l'impression d'être en retard. Je m'adossai contre la barrière et observait les alentours. Le paysage était tellement beau vu d'ici. Le soleil couchant éclairait les montagnes environnantes, le Lac Noir et la forêt d'une lueur orangée, apportant une ambiance douce dans la Tour. Une légère odeur parfumait agréablement l'air, bien que je ne pouvais en déterminer l'origine.

 

« - C'est magnifique, n'est-ce pas ? »

 

Scorpius était silencieusement arrivé et était lui aussi adossé à la barrière. Je me tournai vers lui : il ne souriait même pas, contrairement à ce que le ton avec lequel il avait parlé laissait prévoir.

 

« - Tu voulais me voir ?, demandai-je en reportant mon attention sur les oiseaux qui semblaient flotter dans le ciel orange.

- Je ne ressens pas le moindre plaisir à devoir te croiser de nouveau, Hayleen, grogna-t-il en relevant un sourcil hautain.

- Dans ce cas, répondis-je en tournant les talons, je m'en vais ! Je ne suis pas venue pour me faire incendier, merci mais non merci.

- Ça va, ça va, grogna-t-il en m'attrapant le bras. Je t'ai donné rendez-vous ici pour te demander quelque chose.

- D'arrêter de vouloir t'envoyer à l'infirmerie ?, répliquai-je en ne pouvant empêcher un sourire.

- Je n'y avais pas pensé, mais c'est une bonne idée. Bref, ce n'est pas pour ça que je t'ai demandé de venir.

- Hmm ?

- J'ai besoin de ton aide. »

 

Je ne pus m'empêcher de lâcher une expression surprise. Scorpius avait... Besoin de moi ?

 

« - Pardon ?

- Tu as le cerveau lent, Hayleen, soupira-t-il agacé. J'ai besoin de ton aide.

- Et pourquoi ?, demandai-je méfiante. Si c'est pour m'emporter dans une embrouille...

- Pas très courageuse, la Gryffondor, ricana Scorpius. Tu es sûre d'être allée dans la bonne Maison ?

- Je prends mes précautions, c'est tout, dis-je. Qu'est-ce qui me fait croire que je peux te faire confiance ?

- Je suis seul et je ne compte pas t'attaquer. Ça ne te suffit pas ?

- Il n'y a toujours rien qui le prouve, dis-je tenace.

- Laisse tomber, l'Aigle Triste, s'énerva-t-il avec un rictus dédaigneux. J'ai besoin que tu m'aides à guérir un animal. »

 

Ce n'était que ça ?! Mais pourquoi en avoir fait tout un plat ? Je laissai échapper un éclat de rire.

 

« - Ce n'était pas censé être hilarant, dit-il en relevant un sourcil déconcerté.

- Mais franchement !, m'écriai-je détendue. Tu me fais stresser pour ça ? Tu n'aurais tout simplement pas pu me le demander en cours ?

- Ça ne t'a pas fait du bien de tomber tout le temps, Hayleen, cassa Scorpius en me regardant de haut. C'est déjà humiliant de devoir demander l'aide d'une pauvre gourde en quête de reconnaissance, alors le faire en public serait un déshonneur sans nom. Tu chantes ta petite comptine, tu t'en vas et c'est bon. Je ne te demande pas la Lune. »

 

Tout sentiment rieur s'était barré à des milliards de kilomètres de là aussi rapidement qu'il était arrivé, sitôt remplacé par une colère meurtrière.

 

« - Très bien !, dis-je en m'avançant vers lui. Va compter les gobelins buveurs de sang de la Forêt Interdite, le plus près possible, idiot ! Ne compte même pas sur moi pour t'aider ! Et la prochaine fois que tu as besoin d'aide, criai-je en m'avançant d'avantage, pense à la demander avec RESPECT et GENTILLESSE ! Je te laisse chercher la définition tout seul ! »

 

Mes yeux n'arrivèrent pas à contenir leurs larmes et alors que je me retournais pour courir le plus loin possible d'ici, il m'attrapa à nouveau le bras.

 

« - Hayleen !

- Laisse-moi ! », tentai-je de crier malgré les sanglots brouillant ma voix.

 

Il me lâcha enfin mais ne me laissa pas le temps de partir.

 

« - Pardonne-moi, je ne voulais pas te dire ça, bégaya-t-il. Excuse-moi.

- J'ignorais que tu connaissais ces mots, lâchai-je les larmes coulant toujours sur mes joues. On frise le miracle.

- C'est vrai, admit-il avec douceur. Je suis désolé. C'est sorti comme ça. J'ai vraiment besoin de ton aide. »

 

Mais je n'eus pas la moindre envie de l'aider. Il m'avait parlé comme à un déchet juste bon à rendre service sans rien dire et il pensait qu'un simple « Je suis désolé » me ferait accepter ! Il se fourrait le doigt dans l'œil ! Il me prenait vraiment pour une quiche !

 

« - Je t'en prie, Hay... Automne. »

 

Je me retournai, surprise. Il m'avait appelée par mon prénom. Chose qui, d'après ses joues légèrement roses, relevait de la bravoure la plus spectaculaire. Mais il parut si désespéré que je me surpris à avoir pitié de lui.

De longues secondes passèrent durant laquelle on se regarda droit dans les yeux, lui avec supplication, moi avec hésitation.

 

« - Où est cet animal, au juste ?, demandai-je sèchement en brisant le silence.

- Il arrive lorsque le soleil a disparu du ciel, vers 19 heures. Il vient de la Forêt Interdite, ajouta-t-il en me voyant froncer les sourcils. Je suis venu un soir ici et il était là. Depuis, je viens tous les jours pour le voir. Mais il a l'air d'aller de plus en plus mal et c'est pour ça que j'ai pensé que tu pourrais l'aider, tu vois ? »

 

Le ciel commençait à s'assombrir sérieusement. Je ne savais pas s'il fallait que je m'en aille ou que je reste. D'un côté, je restais blessée qui m'ait parlé aussi mal -malgré le fait que je savais que c'était Malefoy et que je ne pouvais rien espérer de lui- , d'un autre j'avais envie de l'aider et au milieu, toute cette histoire m'intriguait. Quel était l'animal dont il parlait, mystère. Je n'allais pas tarder à le savoir.

Soudain, mon épaule se mit à me brûler. Scorpius remarqua ma moue de douleur et me demanda si ça allait. Je n'eus pas le temps de répondre puisqu'à cet instant, la créature apparut dans la Tour d'Astronomie.

Le Cynospectre avança lentement vers nous. Il sembla réticent au début, mais s'approcha de moi, me dévisagea avec une drôle d'expression et s'inclina. Scorpius paraissait fasciné. Moi, j'étais juste stupéfiée. Pourquoi un Cynospectre partait-il de la Forêt Interdite  pour venir ici ? Et comment le faisait-il ?

 

« - J'ignore pourquoi et comment il vient ici, Hayleen, souffla Scorpius comme s'il avait lu mes pensées.

- Tu m'as demandé de le guérir, parvins-je à dire dans un murmure presque inaudible, mais c'est un esprit, il ne peut être blessé...

- Il n'existe pas que les blessures physiques, tu sais, marmonna-t-il agacé. Il paraît faible depuis quelques temps, ça empire. »

 

La créature gémit en une étrange plainte comme pour répondre à Malefoy puis s'assis, nous dévisageant chacun notre tour, l'air abattu.

 

« - Je... Je suis désolée, mais je ne pense pas pouvoir guérir le mal intérieur... Je ne guéris que les blessures physiques...

- Tu es la Gardienne de la Forêt, non ?, insista-t-il. S'il te plaît, Hayleen. J'aime bien les Cynospectres, celui-ci tout particulièrement. J'apprécie sa présence. Tu peux faire ça pour moi ? »

 

Son ton suppliant et la mine désespérée de l'esprit me torturait. Je soupirai.

 

« - Très bien, mais tu auras deux dettes envers moi, Malefoy, dis-je durement.

- Merci », répondit-il avec une sincérité que je n'aurais jamais cru entendre chez lui.

 

Je m'approchai doucement du Cynospectre. Il avait réellement l'air souffrant, ce qui était étrange au plus haut point étant donné que ce n'était qu'un fantôme. Un fantôme maudit, qui plus est. Je tentai de le toucher, mais c'était étrange... A moitié vide, à moitié doux...

 

« - Guéris, fruit de la nature, richesse du monde, soigne tes blessures en une douce seconde. »

 

Ce ne fut pas une zone qui s'illumina d'une puissante lumière mais tout le corps de la créature en une explosion d'argent. Mon épaule s'enflamma à m'en faire venir les larmes aux yeux et je retirai ma main qui semblait me brûler autant que mon épaule. La créature devint dorée et se décolla du sol, montant vers le ciel, tandis que les étoiles semblaient l'absorber. Un instant plus tard, la créature s'était évaporée et était à présent une étoile dans la nuit.

 

« - Est-ce que ça va ?, me demanda Malefoy.

- Ça va, dis-je en me tenant l'épaule qui me brûlait encore. Mais ça n'avait jamais fait ça d'habitude... Je crois que c'est parce que j'ai guéri une créature maudite, vivant dans le mal... C'est le prix d'avoir accordé le Paradis à quelque chose qui était voué à errer sur Terre. »

 

Scorpius releva un sourcil. Je sentis mes jambes devenir guimauve et je m'évanouis sous le poids de la douleur. Ma dernière vision fut le blond qui se précipita vers moi.

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