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Chapitre 12: Rencontres

 

J’aurais eu l’impression d’avoir fait un arrêt cardiaque si je n’avais pas senti mon cÅ“ur battre à toute allure. Le ciel magique avait repris ses habituelles étoiles ; en revanche, rien n’aurait être plus inhabituel que ce silence lourd et écrasant dans la Grande Salle. Hugo avait la tête de quelqu’un qui venait d’avaler des kilos d’insectes. Le visage d’Ethan était d’une extrême pâleur et ses yeux, vides, semblaient me dire de ne pas bouger. Était-ce un signal ? LE signal ? Non... C’était trop tôt... Et j’avais envie de faire quelque chose, mais ce n’était pas d’aller dans la forêt... Il fallait que je sorte. A tout prix. Quelque chose m’attirait irrésistiblement dehors.

Je me levai et sans prêter attention à Hugo et Ethan qui se levèrent également brutalement dans un geste trop lent pour tenter de m’attraper, courus hors de la Grande Salle à m’en exploser les poumons. Je manquai d’exploser une porte en virant trop vite, traversai Sir Nicholas de Mimsy-Porpington (Nick Quasi-sans-tête) et sortit en trombe dans la fraîcheur du soir et des premières étoiles. Seuls le doux bruissement des arbres et le pépiement des chouettes partant chasser perturbaient la nuit calme et mystérieuse. Je me dirigeai, le cœur battant et la respiration courte, vers le lac. J’ignorais pourquoi j’y allais. Je sentais que je devais le faire, c’est tout, et ça aurait été inhumain de rester assise à la table des Gryffondor.

 

 L’eau du lac était noire, lisse, inquiétante et très certainement glacée ; en effet, lorsque je m’agenouillai pour effleurer du doigt la nappe sombre, un frisson me parcourut la colonne vertébrale. Mais ce n’était pas seulement à cause de la température de l’eau : une créature s’abreuvait à la source.

Heureusement, ce n’était qu’un sombral. Il me regarda d’un œil interrogateur et me caressa affectueusement la joue.

 

« - C’est toi qui m’a attirée ici ? Â», murmurai-je en lui caressant la tête.

 

Il déploya ses grandes ailes et frémit des naseaux. Je lui souris tristement malgré moi. C’était l’Aigle qui m’avait appelée, non ? C’est bien son cri que j’avais entendu. Dans ce cas, pourquoi ne venait-il pas ? Peut-être était-il ailleurs, peut-être était-il... Dans la forêt ?

Un craquement sonore me fit sursauter et retourner : c’était... Malefoy ?!

 

« - Qu’est-ce que tu fiches ici ?!, crachai-je.

- En fait, répondit-il tranquillement avec un sourire sournois, je venais voir si tu partais dans la forêt.

- Et en quoi est-ce que ça te regarde, je peux savoir ?, demandai-je la colère retenue au fond de ma gorge.

- Oh, en rien !, dit Scorpius en ricanant. J’avais juste envie de m’accorder le plaisir de te voir mourir. Â»

 

Rien que de voir cette expression de jubilation et d’orgueil me donnait envie de l’étrangler. MERLIN.

 

« - Donc tu peux y aller, je vois que tu t’apprêtais à bouger, à moins que tu ne tiennes à rester ici en attendant ta mort avec ce Sombral ! Â», continua-t-il en voyant que je ne répondais rien, un sourire hautain toujours collé au visage.

 

Je m’apprêtai à protester lorsque je rendis compte de ce qu’il venait de dire.

 

« - Tu peux voir les sombrals ? Â», demandai-je stupéfaite en oubliant toute trace de colère.

 

Il sembla se maudire intérieurement de l’avoir dit et hésita un instant, puis répondit durement :

 

« - Quelle perspicacité, Hayleen !

- Comment ?, continuai-je en ignorant son ton sarcastique.

- Finalement, je retire ce que j’ai dit ! , répondit-il d’un grognement exaspéré en se tournant vers le lac. A ton avis ? Comme toi, je présume ! Â»

 

Ma bouche s’étira en une moue gênée. Forcément !

 

« - Je suis désolée, m’excusai-je. C’était bête.

- Je ne te le fais pas dire !

- Tu ferais peut être bien d’y aller, dis-je froidement. 

- Mon cousin. Â»

 

Cette réponse brusque me pétrifia quelques instants.

 

« - C’était il y a 2 ans, à l’approche de l’hiver. On était allé jouer à côté d’un lac, comme à notre habitude, et cette fois-ci on s’était dit que celui qui réussirait à se baigner entièrement dedans gagnerait le droit de choisir sa confiserie préférée, continua-t-il un léger sourire apparaissant sur ses lèvres, rapidement évaporé. Je suis passé en premier, j’ai réussi et malgré lui avoir dit que ça ne servait à rien car il ne parviendrait pas à me battre, il s’est jeté dedans et... Â»

 

Son souffle se coupa. Je n’ajoutai rien et attendis patiemment en regardant la lune.

 

« - Il n’a pas supporté le froid si brutal et se débattait, d’abord dans tous les sens, puis de plus en plus faiblement. Je pensais qu’il jouait la comédie. Je l’ai vu devenir blanc et lorsque je suis parvenu à nager jusque lui, il était déjà noyé. Â»

 

Il jeta une pierre dans le lac et s’assit, regardant l’eau clapoter avec une expression dans le regard que je n’aurais jamais cru voir dans ses yeux.  J’étais complètement abasourdie. Il avait l’air tellement triste, tellement en colère aussi.

 

« - Je n’aime pas les sombrals, dit-il la voix rauque.

- Ils sont doux, répondis-je doucement en prenant la parole.

- La mort de mon cousin ne l’était pas, me coupa-t-il durement. Il était comme un frère pour moi. Et tout ça, par ma faute. Mais tu ne peux pas comprendre, pas vrai Hayleen ?, me dit-il en tournant enfin ses yeux gris vers moi.

- Non, en effet, je ne peux pas comprendre, répondis-je en le regardant à mon tour. Ça n’est pas une raison pour m’agresser. Moi aussi j’ai vu quelqu’un mourir.

- Était-ce quelqu’un de ta famille ? Quelqu’un que tu aimais ? Quelqu’un qui comptait pour toi ?, dit-il rageusement en connaissant déjà la réponse.

- Excuse-moi...

- Oh, arrête de t’excuser deux secondes, tu veux ? Tu n’as pas la vie facile non plus, à ce que je sache. Â»

 

Je baissai la tête. J’inspirai profondément.

 

« - Ce n’est pas vrai.

- Pardon ?, demanda-t-il déconcerté.

- J’ai eu une belle enfance, encore aujourd’hui je me sens bien. Ma  vie a été belle et je ne m’en plains pas. Elle va juste être... Courte. C’est d’ailleurs pour ça qu’il ne m’est arrivé que de bonnes choses pour l’instant Â», ajoutai-je d’un petit rire pour détendre l’atmosphère.

 

Un faible sourire étira ses lèvres. Un long silence s’ensuivit.

 

« - Alors, tu vas y aller, dans la forêt ?, demanda-t-il finalement.

- Je ne sais pas, répondis-je avec honnêteté. J’ignore si je dois le faire.

- Mais est-ce que tu veux ?

- Je ne sais pas...

- Ça veut dire non, alors. Ne reste pas ici, rentre. En plus, tes fervents admirateurs doivent être morts d’inquiétude Â», ajouta-t-il moqueur.

 

Je jetai un regard vers la forêt. Je n’avais pas entendu l’Aigle de nouveau... Mais ça devait signifier quelque chose, tout de même, je ne pouvais pas partir sans être allée voir, je...

 

L’Aigle. Il se tenait devant nous. D’où est-ce qu’il venait, je n’en savais fichtrement rien. Mais il était là. Majestueux, grand, puissant, l’œil vif et la plume soyeuse. Il semblait en bonne santé. Scorpius recula d’un pas et me jeta un regard mi-terrifié, mi-intrigué. Ma cicatrice chauffait agréablement mon épaule. Lorsque l’Aigle s’approcha et l’effleura du bec, je sentis comme une explosion intense : elle était à présent d’un argent pur et brillait de mille feux.

 

« - Bonjour Â», fis-je simplement.

 

Il me caressa la joue et émit un léger sifflement. Je lui caressai la tête. Ce que c’était étrange... C’était puissant, aussi. Rien n’aurait pu être plus fort que cet instant, en vérité.  Curieusement, mon cÅ“ur battait lentement, avec calme. J’ignorais aussi quoi faire. Il était là, en bonne santé, devant moi, il m’avait appelée. Ou alors...

 

« - C'est moi qui t'ai appelé? Â», demandai-je.

 

L’oiseau hocha la tête et me regarda d’un air interrogateur. C’était alors bien moi qui, en chantant tout à l’heure, l’avait appelé. Mais pourtant... J’avais chanté bien plus d’une fois après la bénédiction de l’Aigle, il n’était pas venu pour autant.

 

« - Pourquoi maintenant... ?

- Hayleen, il se passe quoi ?! Â», dit une voix au ton exaspéré.

 

J’avais oublié Scorpius. Il se tenait en arrière, un air d’incompréhension dissimulé sous une méfiance à l’égard de l’oiseau.

 

« - Pourquoi tu pépies depuis tout à l’heure ?

- Je quoi ?

- Tu PÉPIES !, répéta-t-il avec agacement. Tu GAZOUILLES ! Tu te la joues aigle, ou du moins oiseau Hayleen, n’oublies cependant pas que tu es humaine.

- Comment ça, je gazouille ?!, demandai-je sans comprendre.

- Tu parles oiseau, quoi !, répondit Malefoy l’air déconcerté en constatant que je ne voyais absolument pas de quoi il parlait. Tu ne t’en rends pas compte ?

- Tu ne serais pas un peu en train de te payer ma tête, par hasard ?, dis-je irritée.

- Franchement, est-ce que j’ai l’air de plaisanter, Hayleen? Â», ajouta-t-il d’un air féroce.

 

Un bruissement d’aile interrompit nos chamailleries et nous nous retournèrent tous les deux face à l’Aigle. Je m’excusai automatiquement, bien que ce soit complètement idiot. Cependant, il hocha la tête et se mit à boire dans le lac.

 

« - Tu as recommencé !, cria Scorpius en pointant vers moi un doigt accusateur.

- Étrange, réfléchis-je tout en observant l’oiseau se laver les plumes. Je sais parler aux oiseaux... Bien sûr !, m’exclamai-je soudainement. Ça doit marcher pareil que le Fourchelang, non ? En me donnant cette bénédiction, l’Aigle m’a également donné le pouvoir de lui parler. Â»

 

Il leva un sourcil hautain et ne répondit rien. Moi non plus, je ne savais pas quoi dire. L’Aigle, l’animal dont j’avais sauvé le petit, qui m’avait offert la bénédiction d’une protection à toute épreuve lorsque je n’étais âgée que de 6 ans était devant moi pour la première fois depuis toutes ces années, et je me retrouvais bras ballants, à le regarder stupidement faire sa toilette.  Si je pouvais lui parler et qu’il me comprenait... Pourquoi ne me répondait-il donc pas ?

 

« - Ça fait bien longtemps, n’est-ce pas ? Â»

 

Je me retournai ébahie. Je rêvais où l’Aigle venait de me parler ?!

 

« - Ne t’inquiète pas, ce n’est que moi, ajouta-t-il sereinement d’une voix grave mais rassurante. Je t’ai entendue chanter. Je pensais donc que tu m’avais appelé, mais apparemment ce n’est pas le cas.

- Je... Je suis réellement désolée, ce n’était pas voulu, répondis-je la voix tremblante. Je ne pensais pas que ça t’appellerait. Comment est-ce que ça se fait ? J’ai chanté énormément de fois depuis ce fameux jour...

- J’ai ressenti une tristesse dans ta voix que je n’avais auparavant pas entendue, tout simplement, dit-il les yeux déterminés. Je pensais que cette fois, tu avais besoin de mon aide.

- On va mourir !, laissai-je échapper brusquement. Dans le conte de l’Aigle Triste, où j’ai par ailleurs découvert toute cette histoire dont je ne me rappelais nullement et dont je n’avais aucune connaissance, il est révélé que je te trouverai un jour dans la forêt, gravement blessé et que je ne pourrai pas te soigner. Et que nous mourrions tous les deux... Â»

 

L’Aigle sembla réfléchir longuement, le regard un peu perdu, puis il répondit tout aussi calmement :

 

« - Il arrive parfois que les traits du destin soient sombre, ce n’est pas pour autant que l’on est contraint de les regarder s’approcher.

- Mais peut-on réellement passer entre eux ?, demandai-je piteusement. Je ne veux pas que tu meures.

- Tu sais Automne, c’est aussi pour cela que je t’ai choisie. Une noblesse d’âme profonde, à penser aux autres avant soi. On peut certainement changer le destin, ajouta-t-il en voyant que je m’apprêtai à rajouter quelque chose, le tout est de savoir comment. On ne peut changer le passé mais l’avenir est façonnable d’une infinité de façons. Ce sont nos choix qui sont importants. Â»

 

Il s’inclina, je fis de même ; et avant que je puisse rajouter quelque chose, il déploya ses ailes, émit un long cri et s’envola vers les montagnes qui entouraient Poudlard, disparaissant de mes yeux troublés. 

Je m’assieds sur l’herbe fraîche et, entourant mes jambes de mes bras, y cachai mon visage. Des pleurs incontrôlés me secouèrent violemment, sans même que je sache pourquoi. Tout ce que j’avais emmagasiné s’évacuait, mais au lieu de me faire du bien, je crois que ça me transperçait de part en part. Une main réconfortante me prit par l’épaule.

 

« - Allez, viens... Â», me disait une voix douce et rassurante que je ne reconnaissais pas.

 

Peu importe qui c’était, je n’avais pas envie de rentrer au château. Je voulais rester ici, ou m’enfuir dans la forêt. Je secouai la tête.

 

« - Ne reste pas ici... Automne Â», ajouta la voix en serrant d’avantage mon épaule.

 

Je me relâchai de son étreinte et courut droit vers la Forêt Interdite, ignorant les cris et les appels derrière moi. Lorsque je pénétrai dans la masse sombre et boisée, je m’y sentis déjà beaucoup mieux mais ne cessai de courir. Zigzaguant entre les arbres, les yeux toujours pleurants, je cherchai un endroit où me cacher. Je tombai alors devant un magnifique chêne aux branches solides. Je le grimpai au plus haut que je pus : dans le tronc, un énorme trou était creusé, capable de m’y faire tenir. Je m’y réfugiai et le visage baigné de larmes, m’endormis le cÅ“ur tordu.

 

                                                                                OooooooOooooooOooooooOooooo

 

Une légère brise m’effleura la joue et j’ouvris des yeux secs et troubles. Les membres engourdis, oubliant où j’étais, je m’étirai longuement et me frottai les yeux en un grognement à peine audible. Je sortis du tronc mais glissai et manquai de tomber du haut du chêne, me tenant à la branche. Par Merlin ! Tout me revint. J’avais passé la nuit dans un tronc d’arbre après avoir rencontré l’Aigle... Je m’attachai les cheveux. J’avais bien dormi et me sentais reposée. Mais quelle heure était-il ? Il devait être tôt car le soleil était encore bas dans le ciel. Je grimpai davantage et sortit ma tête à travers les  feuilles : je pouvais voir toute la forêt. Immense et sombre mais ponctuée de tons orangés, elle semblait s’étendre sur des kilomètres et des kilomètres. J’inspirai une longue bouffée d’air pur, les odeurs forestières se propageant dans mes poumons. Que devais-je faire, maintenant ?

 

« - ... Tomne ! 

- Automne ! Â»

 

Quelqu’un m’appelait ? Je reconnaissais leur voix !

 

« - Ethan ? Hugo ?, criai-je.

- Automne ! Où es-tu ?! Â», entendis-je crier Hugo.

 

C’était bien eux. Après avoir lancé un dernier regard à l’étendue de la Forêt Interdite, je redescendis le plus vite possible et au bout de quelques secondes, mes pieds touchèrent le sol.

 

« - Automne ! Par Merlin !, hurla presque un Ethan au visage déformé par la peur et l’inquiétude, courant dans ma direction, suivi par un Hugo à l’air terrorisé.

- Bonjour Â», réussis-je à bafouiller avec un sourire.

 

Ethan me serra dans ses bras.

 

« - Automne, où étais-tu passée ?, me demanda-t-il. On était fous d’inquiétudes !

- Je suis désolée, répondis-je. Il faut que je vous raconte ce qui s’est passé. Â»

 

Ethan me relâcha et nous nous assîmes en cercle. Je pris une longue inspiration et me lançai dans mon récit.

Une fois terminé, je les observai l’un après l’autre : ils avaient tous deux l’air partagés entre l’inquiétude encore présente, la surprise et le bouleversement. De longues secondes de silence s’ensuivit, mais lourdes de choses qu’on aurait voulu dire à cet instant.

 

« - Ça n’a pas été trop inconfortable de dormir dans un trou ?, dit finalement Hugo en souriant.

- Je le faisais parfois quand j’étais petite, répondis-je en souriant à mon tour. Bien que je me réveille toujours les bras et les jambes engourdis, je trouve ça agréable.

- Quel personne génialement étrange tu fais, Automne, rit Ethan.

- Et au fait, comment m’avez-vous retrouvée ?, demandai-je soudainement.

- Quand tu es allée dehors, on a voulu directement te rejoindre car on saurait que tu irais dans la forêt, répondit Hugo. Mais bien évidemment, on n’a pas pu ! Le professeur McGonagall nous a retenus. Alors on est sortis ce matin pour partir à ta recherche.

- Et Scorpius ?, dis-je les sourcils froncés.

- Quoi, Scorpius ?

- Il est venu me rejoindre hier aussi.

- Vraiment ?!, s’exclama Ethan. Que voulait faire cet infâme cafard boiteux ?

- Me voir mourir, répondis-je calmement. Il était avec moi lorsque l’Aigle a débarqué mais je ne sais pas où il est passé par la suite.

- Ce sale rat !, dit Hugo d’un air féroce. On ne l’a même pas vu sortir, ni rentrer.

- Il est tellement maléfique qu’il a dû creuser dans le sol de la Grande Salle jusque dehors afin de ne pas se faire voir », lança Ethan sans pouvoir retenir un sourire.

 

J’avais soigneusement évité de parler de ce que m’avait dit Scorpius. C’était son secret et il m’avait accordé sa confiance –d’où venait-elle, je me le demandais- pour me le raconter. Je n’avais nullement le droit d’en parler à Ethan et Hugo, même si je savais parfaitement qu’ils ne répéteraient rien.  

 

« - Je me disais bien aussi qu’il avait une odeur de terre à la table des Serpentard !, s’exclama Hugo.

- Mais quelle heure est-il, au fait ?, demandai-je.

- Presque 8 heures, il me semble, répondit Ethan.

- Je suis désolée d’être partie comme ça hier soir, sans rien vous dire, m’excusai-je honteuse.

- On comprend parfaitement, répondit Hugo avec un petit sourire rassurant.

- C’est vrai, ne t’inquiète pas ! Â», renchérit Ethan.

 

Je leur souris à mon tour. J’avais tellement de chance de les avoir ! J’en étais sûre, à présent : quand je mourrai –si je meurs ?- ils ne m’oublieront pas.

 

« - Par contre... Comment on va retrouver le chemin pour revenir à Poudlard ?!, s’exclama un Hugo catastrophé.

- Automne le sait Â», répondit Ethan du tac-au-tac.

 

Je le regardai, surprise. Il me sourit d’un air entendu et se leva.

 

« - On y va ? Sinon, ils vont se demander où nous sommes.

- Ils ?, demandai-je –stupidement.

- Les professeurs, répondit-il. Déjà que McGonagall n’avait pas l’air ravie de te voir partir...

- C’est étrange d’ailleurs, qu’elle ne soit pas venue te chercher !, commenta Hugo en hochant la tête. C’est une très grande sorcière. Elle aurait pu te faire revenir direct dans la Grande Salle sans avoir eu le temps de dire Quidditch.

- C’est vrai que c’est étrange, dit Ethan en fronçant les sourcils. Peut-être qu’elle savait qu’il ne t’arriverait rien ?

- Elle n’est pas professeur de Divination, Ethan, répondis-je en laissant échapper un petit rire.

- Non, je veux dire parce qu’elle sait que tu es intelligente ! Â»

 

Je répondis par un petit sourire, ne sachant quoi dire. Il serait facile de nous orienter, il suffisait de reconnaître les endroits où j’étais passée hier ! Alors, tout en discutant de ce qui s’était passé et de ce qui pourrait se passer, nous marchions dans la forêt lorsqu’une voix grave nous fit sursauter.

 

« - Vous ne devriez pas être là, humains Â», dit-elle.

 

Cherchant la source de cette voix, je tournai ma tête dans tous les sens. Soudain, je le vis : un centaure, l’air buté et visiblement mécontent, se tenait entre les arbres, accompagné de deux autres. Il avait des cheveux bruns, épais et bouclés ainsi qu’une barbe assez imposante. Ses yeux bleus et perçants nous analysaient.

 

« - Ce sont des poulains, Wale, dit un des deux compagnons au premier. Ils sont inoffensifs.

- Ce n’est pas sûr, Gonath, grogna Wale d’un air sceptique, les yeux froncés.

- Ils n’ont pas plus de 11 ans, ajouta Gonath. Qu’en penses-tu, Meryan ?

- Ils ne peuvent apporter aucun trouble à la forêt, répondit Meryan, le 3ème centaure à l’air plus rassurant en nous adressant un sourire. Tu sais qui elle est, Wale.

- Il n’empêche qu’elle reste humaine, répéta celui-ci en m’adressant un coup d’œil peu aimable. Les étoiles ont prédit un triste événement, tu le sais.

- Mais ce sont des poulains !, dit Gonath. Les étoiles n’ont pas parlé de poulains.

- Mais elles ont parlé d’elle.

- Elles en parlent tout le temps ; elle est, après tout, la vie de la forêt Â», dit Meryan.

 

Je ne savais pas de qui ils parlaient et au vu des regards d’Ethan et Hugo, ils l’ignoraient eux-mêmes. Qui était la vie de la forêt dont parlaient les étoiles ? Et de toute manière, en quoi cela nous concernait ?

 

« - Que faites-vous ici ? Â», nous demanda finalement Wale les yeux toujours plissés.

 

Je jetai un regard à Ethan et Hugo, qui n’avaient pas l’air plus vaillants que moi. Finalement, je répondis simplement :

 

« - J’y ai dormi cette nuit. Mes amis m’ont retrouvée ce matin et nous étions en train de rentrer à Poudlard.

- Vraiment, commenta Wale en plissant tellement les yeux qu’ils paraissaient fermés.

- Les étoiles l’avaient prédit, sourit Gonath.

- Pardonnez-moi, mais qu’ont-elles prédit ?, demandai-je.

- Que la Gardienne, dans la forêt s’endormirait, répondit Meryan avec un léger sourire et un coup d’œil rapide à Wale.

- La Gardienne ?

- Toi, sourit-il simplement. L’Aigle Triste, aussi appelée la Vie ou la Gardienne de la forêt. Â»

 

L’information mit un certain temps à pénétrer mon cerveau. Et voilà de nouveaux surnoms.

 

« - Je suis désolée d’avoir enfreint les règles, mais j’ai dû dormir ici cette nuit, dis-je clairement à Wale. Et je n’ai pas, à ma connaissance, perturbé l’équilibre de la forêt. Â»

 

Je fus moi-même surprise de mon aplomb mais ne laissai rien paraître. Meryan m’adressa un autre de ses sourires discrets tandis que Wale parut légèrement amusé de mon audace. Finalement, il nous adressa un rapide hochement de tête et repartit d’où il était venu. Gonath le suivit en nous adressant à son tour un hochement de tête –plus sympathique que son collègue.

 

« - A bientôt je l’espère, amis humains, nous dit Meryan. Prends soin de toi, Automne Hayleen Â», ajouta-t-il enfin d’un ton un peu plus grave, le regard prudent.

 

Il repartit alors, suivant les autres centaures.

 

« - Ce Wale n’a pas l’air commode, dit Hugo en levant un sourcil.

- Alors, la Gardienne de la Forêt, hein ?, souffla un Ethan amusé.

- Ce n’est qu’un surnom de plus, répondis-je en haussant les épaules.

- Ah, les centaures et leurs étoiles !, ajouta Hugo. Ils sont passionnants et très intelligents mais... Pfiou.

- Gonath et Meryan sont gentils, il n’y a que Wale à avoir été plus farouche ! Â», dis-je.

 

Nous continuâmes notre chemin sans rencontrer rien ni personne, sortant de la Forêt Interdite quelques minutes plus tard.

 

« - Bravo Automne !, me félicita Hugo. Tu portes bien tes noms.

- Je te l’avais dit ! Â», rit Ethan.

 

A peine avions-nous franchi les portes de Poudlard qu’un Peter en furie me sauta dessus.

 

« - AUTOMNE ! PAR LA BARBE DE MERLIN !

- Je vous laisse, les garçons, murmurai-je à Ethan et Hugo qui s’en allèrent en faisant une moue de compassion.

- Tu es allée dans la forêt !, hurla mon frère en m’étouffant dans ses bras. Tu es complètement folle ! Tu voulais mourir ou quoi ?!

- J’ai rencontré l’Aigle devant le lac, répondis-je immédiatement. Il était en parfaite santé et je l’ai prévenu. Peete, lâche-moi, c’est toi qui vas me tuer à force de me serrer comme ça. Â»

 

Il relâcha son étreinte, soupira ... Et me serra de nouveau.

 

« - J’ai été tellement inquiet, Automne !, sanglota-t-il finalement. Je pensais que... Que c’était l’heure ! Comment as-tu pu me faire ça ?!

- Pardonne-moi, mais je l’ai appelé sans faire exprès, il est venu et je suis allée le voir. Â»

 

S’ensuivit toute une conversation, moi qui tentais de calmer Peter qui était partagé entre le soulagement profond et la colère intensément puissante tout en supportant les regards des élèves de toute sorte.

 

« - Miss Hayleen ? Venez dans mon bureau, s’il vous plaît. Â»

 

Le professeur McGonagall m’attendait au bout du couloir, l’air sévère. Je lui devais sûrement des explications. Mais comment lui dire tout ça ? Telle était la question. Tout comme celle-ci : comment défier les étoiles et échapper au destin... ?

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